Né au Canada, diplômé en urbanisme et installé en Suisse, Pierre Yves Delcourt est tombé sous le charme de Bormes-les-Mimosas en 2016. Il a acquis une maison dans le vieux village et s’est lancé dans l’écriture d’un livre sur l’histoire de « Bormes avant les Mimosas ». Dans cet ouvrage préfacé par le maire François Arizzi, ce spécialiste en aménagement du territoire s’est intéressé à l’effacement d’un terroir traditionnel sur la côte varoise de la protohistoire à 1945. Rencontre.
Comment avez-vous découvert Bormes ?
Lors d’un séjour aux Salins de Hyères, l’amie à qui je rendais visite m’a suggéré de visiter le village, me disant qu’il allait surement me plaire… Ce fut le coup de cœur.
Comment est venue l’idée d’écrire un livre sur l’histoire de la commune ?
J’ai conduit des projets d’aménagement du territoire, comme celui du Grand Besançon, de la Métropole européenne de Lille et de l’agglomération de Lausanne. Chaque projet est spécifique parce qu’il s’appuie sur un contexte particulier. Je suis particulièrement attentif à la géographie et aux « accidents » de l’histoire, à ces évènements qui ont modifié le destin du lieu. J’ai tout de suite vu qu’il s’était passé des choses dans le village et dans son environnement naturel… mais quoi, quand et pourquoi ? La lecture des ouvrages historiques sur Bormes, sur la Côte d’Azur et sur la Basse-Provence orientale ne permettait pas de répondre complètement à mes questions. J’ai donc fait mes propres investigations. De là m’est venu l’idée d’en faire un livre.
Quel a été le travail de recherches ?
D’abord, j’ai voulu aller aux sources des informations. Comme l’a écrit l’Abbé Papon, auteur de l’Histoire générale de la Provence, c’est en remontant aux originaux, qu’on donne à l’Histoire le premier de tous les mérites, qui est celui de l’exactitude. J’ai ensuite voulu croiser les regards parce que l’Histoire s’appuie sur des faits mais est aussi une construction subjective. J’ai consulté le travail d’historiens, d’archéologues, de géographes, d’économistes, de hauts fonctionnaires, de politiciens, de voyageurs et de romanciers. J’ai voulu m’approcher au plus près de l’objectivité en laissant une place à l’émotion, en donnant la parole aux observateurs de l’Antiquité jusqu’au milieu du XXe siècle.
Pourquoi avez-vous choisi de relater l’évolution de la commune sur cette période de la protohistoire à 1945 ?
Je suis remonté jusqu’à la protohistoire parce que comme l’a dit André Corboz, historien de l’art, de l’architecture et de l’urbanisme, dans les contrées où l’homme s’est installé depuis des générations, a fortiori depuis des millénaires, tous les accidents du territoire se mettent à signifier. Les comprendre, c’est se donner la chance d’une intervention plus intelligente. Mais je n’ai pas voulu aller au-delà de 1945 parce que je n’ai pas le recul nécessaire pour poser un regard détaché de ce qui s’est produit depuis lors.
A qui s’adresse votre ouvrage ?
J’ai souhaité fournir aux autorités locales des données et des analyses pour alimenter leurs réflexions sur l’avenir du développement et de l’aménagement de Bormes-les-Mimosas et du Lavandou. J’ai voulu offrir à la population un regard renouvelé, nuancé et argumenté sur l’identité du territoire, ses lignes de force, ses lignes de faiblesse. Mon travail souligne sa résilience et sa fragilité. Il pourrait contribuer à mobiliser la population autour d’une nouvelle stratégie de développement et d’aménagement du territoire. Enfin, mon travail s’adresse à tous les spécialistes qui s’intéressent à la Provence.
Propos recueillis par Bertrand Kerhello, Var-Matin, le 12 décembre 2021